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Affaire Dreyfus: l'aveu et le regret d'un magistrat,lettre Edmond Gast,à Melle Cabarrus, 28 juillet 1906

Lettre accompagnée de l'enveloppe, adressée à Melle Cabarrus, hôtel de la Paix, Plombières-les-bains, Vosges. Tampon de la poste avec date.

« que de grandes choses accomplies en si peu de temps et après une aussi longue et aussi pénible attente !Quelle revanche rapide et glorieuse e ces deux dernières années !Jusqu’à cette dernière cérémonie de la décoration de Dreyfus qui vous a tant émotionnée() Moi aussi , j’en ai eu la gorge serrée et le soir en lisant « le Temps » , j’essuyais avec force les verres de mon lorgnon !Je n’ai pu y assister, le départ de Sarraut m’ayant retenu à Ville d’Avray() Déjà la séance de la Cour de cassation m’avait extrèmement serré la poitrine Il voudrait organiser un diner avec Picquart Il revient sur le duel Sarraut « épisode cruel qui aurait pu devenir tragique. Je connais très peu Sarraut mais Thomson et Clemenceau, les témoins m’avaient demandé dès l’incident à la Chambre que le duel ait lieu à Ville d’Avray. Comment refuser ? « j’ai rencontré l’autre jour au Cercle () Pottier le conseiller à la Cour de Cassation.C’est lui qui , il y a 8 ans , aux plus mauvais jours , à déjeuner dans ce même cercle, m’a dit » Pourquoi avez-vous , à 36 à peine la prétention d’avoir raison contre 36 millions de Français ? » Je lui avais répondu « mon cher, vous êtes président de chambre à la Cour d’appel ( c’était sa place à l’époque) et la phrase que vous venez de me faire est indigne d’un magistrat »E nous avions rompu. C’est lui qui dans le milieu. () la haine anti dreyfusarde. Or l’autre jour il est venu à moi et il m’a dit : »je vous ai vu l’autre jour à la Cour de Cassation, mon cher , et je tiens à vous dire que pendant tout le procès je n’ai fait que penser à la parole regrettable que je vous ai dite , ici même il y a 8 ans » C’était l’aveu et le regret ! Ça vient pas trop tôt ! () « je ne me plains pas du gouvernement. Il a bien et rapidement agi Je n’ai pas cédé mon tour de parole à Préssensé . Le cabinet , ému de mon intervention a répondu par le projet de loi Picquart et Dreyfus et il a été convenu que je me tairais. L’ordre du jour félicitant les artisans de la Révision et flétrissant les criminels a été accepté par le cabinet et voté à une grande majorité