Adresse à l'Assemblée nationale: les Juifs de Bordeaux s'inquiètent d'être confondus avec les Juifs d'Alsace Lorraine


Adresse des Juifs régnicoles de Bordeaux aux députés des Juifs de Bordeaux leur demandant de les représenter afin de défendre leurs droits, craignant de les perdre du fait des demandes des Juifs d'Alsace, de Lorraine et des Trois-Evêchés.

En notre qualité de Juifs Régnicoles de Bordeaux nous avons joui sans trouble dans cette ville et dans son ressort de tous les droits de citoyens ; nous vivions ainsi dans la plus parfaite sécurité sur notre qualité de François et sur les droits qui en émanent lorsque les dernières nouvelles publiques nous ont tout à coup causé quelque inquiétude () Nous osons même croire que notre état en France ne se trouveroit pas aujourd’hui soumis à discussion si certaines demandes des Juifs d’Alsace , de Lorraine et des trois Evéchés n’eussent fait naître une confusion d’idées qui paroit nous envelopper. Nous ne savons pas encore bien précisément quelles sont ces demandes ; mais à en juger par les papiers publics elles devroient paraitre bien extraordinaires puisque ces Juifs aspireroient à vivre en France sous un régime particulier, à avoir des lois qui leur fussent propres, et à constituer une classe de citoyens séparée de toutes les autres . S’il est vrai que cette prétention ait été formée, nous ne devrons l’approprie qu’à l’effervescence d’un zèle religieux mal entendu () Quant à nous , notre état est fixé en France depuis bien longtemps ; les preuves vous en seront fournies, Nosseigneurs, par les députés que nous avons l’honneur d’envoyer auprès de votre Auguste Assemblée () 1°Nous sommes naturalisés François et depuis 1550 nous jouissons de tous les droits des régnicoles ; nos lettres patentes datent de cette époque ; elles ont été renouvelées de règne en règne et sont revêtues de l’enregistrement légal 2°Nous possédons dans le royaume toute espèce de propriétés 3°Nous jouissons du droit indéfini d’acquérir des immeubles et d’en disposer par vente, par testament et par tous les actes ordinaires de la Société civile 4° Nous n’avons ni lois , ni Tribunaux , ni Officiers particuliers 5° Nous participons à Bordeaux au droit de bourgeoisie 6° Nous supportons toutes les impositions royales, sur le même pieds que les autres Français 7°. Nous avons toujours été appelés au service municipal ; et quant aux emprunts royaux , emprunts patriotiques et autres dons de bienfaisance ,notre zèle a toujours égalé celui de nos concitoyens () 8° () Nous avons concouru à toutes les élections 9° () cooperé à la formation des régimens patriotiques () notre culte ne nous empêche pas d’y faire le service, même le samedi ()

Date de publication
1789-12-31
Siècle
18
Régime ou époque
Révolution française
Région
Europe de l'Ouest > France
Europe de l'Ouest > France > Aquitaine
Lieu d'édition
Bordeaux
Pays d'édition
France
Thématique
Emancipation
Type de document
Imprimé - Imprimés reliés
Langue principale
français
Format
In-folio
Nombre de pages
2
Editeur - imprimeur
Baudoin, Imprimeur de l'Assemblée nationale
Propriété
Collection Nicolas Philippe
Remarques sur le contexte historique

Cette Adresse fait suite à un débat qui s'est déroulé quelques jours plus tôt ,entre le 21 et le 24 décembre 1789, sur la question de l'accès des non catholiques aux emplois publics et militaires. Un Edit de 1787 les exclut des places de municipalité. Dans le cours du débat , Stanislas de Clermont Tonnerre a fait la proposition suivante:" Aucun citoyen réunissant les conditions d'eligibilité ne pourra être exclu d'aucun emploi, à raison de sa profession ou du culte qu'il exerce". Le 23 décembre, il prononce ces phrases célèbres: "Les plus graves reproches qu'on fait aux Juifs sont injustes , les autres sont spécieux.. Il faut refuser tout aux Juifs comme Nationdans le sens de corps constitué et accorder tout aux Juifs comme individus. ils faut qu'ils ne fassent dans l'Etat ni un corps politique, ni un ordre, il faut qu'ils soient individuellement citoyens" Mais le 24 décembre, l'Assemblée décide d'ajourner la question , par la formule suivante , qui csera réitérée à plusieurs reprises , jusqu'en octobre 1791" sans entendre riensur les Juifs sur le sort desquels l'Assemblée se propose de statuer"

Cette délibération provoque l'inquiètude des Juifs de Bordeaux qui ont peur de perdre les avantages de leur statut Ils s'opposent à des Juifs de l'Est avec des arguments contestables: ceux ci n'ont jamais demandé à bénéficier d'un statut particulier

Bibliographie
David Feuerwerker "l'émancipation des Juifs en France p328, Albin Michel 1976
N° boîte
B04
N° d'inventaire
D023
Permalien
https://fhju.fr/idurl/1/1826


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