Gast témoigne dans cette lettre de l'audience correctionnelle du 21 septembre réunie pour statuer sur la demande de libération de Picquart présentée le 8 septembre. Picquart est en détention préventive depuis le 8 juillet 1898, accusé d'espionnage pour avoir permis à son avocat Leblois de consulter des documents du dossier à charge contre Dreyfus.
Le coup de théâtre: le substitut annonce àl'audience que l'autorité militaire porte plainte contre Picquart sous l'accusation de faux.
Le colonel est accusé d'avoir falsifié une pièce " le petit bleu". Pour les chefs militaires, l'objectif est clair:"discréditer le témoin principal de Dreyfus, intimider , dérouter le commission consultative" ( Reinach T4 p299)
La déclaration de Picquart qui fait frissonner l'auditoire
La déclaration est restée célèbre: "J'irai peut être ce soir au Cherche Midi.C'est probablement la dernière fois avant cette instuction secrète que je puis dire un mot en public.Je veux que l'on sache, si on trouve dans ma cellule le lacet de Lemercier Picard ou le rasoir de Henry que ce sera un assassinat , car jamais un homme comme moine pourra avoir, un instant l'idée du suicide. J'irai le front haut devant cette accusation et avec la même sérénité que j'ai apportée toujours devant mes accusateurs " ( l'instruction Fabre p 320)
La Commission consultative :
Sur la base de nouvelles preuves de l'innocence de son époux , Lucie Dreyfus a déposé une demande de révision du procès. La recevabilité de la demande est instruite par une Commission de 6 membres ( 3 conseillers à la Cour de cassation , 3 fonctionnaires de justice) qui délibère pendant trois jours au Ministère de la Justice . La commission se divise: les 3 conseillers votent contre , les 3 fontionnaires votent pour.Pourtant il est établi que les juges ont condamné sur la base de documents faux et le commandant Henry , qui s'est suicidé en prison , a reconnu en être l'auteur. Les conseillers font consigner que selon eux "le faux d'Henry, posstérieur de deux ans à la décision du conseil de guerre ne pouvait avoir influé sur cette décision" et"il résultait des procédures de 1894 que le rôle d'Henry au procès avait été insignifiant" Gast déduit de ce vote que la commission a tranché en faveur de la révision et donc du renvoi du dossier à la chambre criminelle de la Cour de cassation. La question a été controversée. " D"après les usages parlemenataires, le partage des voix équivaut à un refus.Au criminel la règle générale est au contraire que l'avis le plus favorable à l'accusé doit l'emporter" ( Reinach T3 p 203) . Au nom de ce principe, et après d'âpres débats, le Conseil des Ministres votera en faveur du renvoi à la Cour de cassation